vendredi 6 novembre 2015

[Livre] Une nuit à New York de David Levithan et Rachel Cohn

Lgf - Le livre de poche, 2012
224 pages
Date de parution originale : 2006
Titre VO : Nick and Norah's Infinite Playlist

« Il y a trois semaines, deux jours et vingt-trois heures qu'elle m'a dit " c'est fini ". Et la voilà déjà avec un autre. Ils s'approchent du comptoir. Il faut que j'agisse. Je me tourne vers une fille que je ne connais même pas, et je lâche : Tu veux bien être ma copine pendant les cinq prochaines minutes ? » 
Nick et Norah n'ont rien en commun. Sauf un premier baiser, censé durer cinq minutes. Et qui va se prolonger toute une nuit. Une seule nuit ?

15/20

J'avais beaucoup aimé le film il y a quelques années (même s'il faudrait que je le revois aujourd'hui pour me refaire une petite idée) et c'est en partie pour cette raison que je voulais découvrir le roman de David Levithan et Rachel Cohn. Et c'est bien simple : l'histoire d'amour entre Nick et Nora prend tellement plaisir à casser les codes et dégage tellement de naturel que j'ai adoré ma lecture.

J'ai beaucoup aimé suivre cette romance en alternance du point de vue des deux protagonistes. Découvrir la façon de penser de chacun de ces deux ados un peu perdu, leurs attentes, leurs goûts musicaux, leurs particularités tout au long de cette nuit. Les deux visions se complétaient au final très bien et je n'ai pas trouvé un seul des passages de ce roman en trop ou inutile.
« Les riffs virevoltent autour de nous en une tornade qui se resserre et se resserre et se resserre ; nous sommes au centre du cyclone, au centre l’un de l’autre. Mon poignet effleure le sien à l’endroit exact où battent nos pouls, et je vous jure que je perçois le sien, cette vibration. Roc immobile, nous bougeons au rythme de la musique. Au lieu de me perdre dans le torrent, je la trouve. Et elle… oui, elle aussi me trouve. »
Placer cette rencontre sur fond de musique donne un petit charme particulier à l'histoire, un style un peu rétro, un brin grunge, qui change de ces petites amourettes à l'eau de rose. Une rencontre qui dure le temps d'une nuit. Durant toute la nuit, Nick et Nora se perdent de vue, se retrouvent, se heurtent, s'apprivoisent. J'ai vraiment apprécié la spontanéité qui se dégage du couple qu'ils finissent par former.
« L’accord parfait. Pas parce qu’un morceau de moi s’emboîte dans un morceau d’elle ; parce que nos mots s’encastrent les uns dans les autres pour former des phrases ; parce que notre dialogue dessine la scène d’un film continu aussi familier qu’il est improvisé. »
Bon et puis, l'écriture des deux auteurs m'a conquise. Certains passages possèdent juste ce qu'il faut de joliesse et de vérité pour réussir à toucher, faire rire ou tout simplement pour comprendre la frénésie (amoureuse !) qui s’abat sur les personnages.
« J'emmerde Tris. Je donnerais un rein pour qu'un type m'écrive des choses de ce style. Les deux, même. Tiens, Nick, ils sont à toi... Simplement, écris pour moi. Voilà le point de départ : un garçon dans une boite punk demande à une fille zarbi d'être sa copine pendant cinq minutes, la fille embrasse le garçon, le garçon lui rend son baiser, le garçon apprend ensuite à connaître la fille... Qu'as-tu vu chez cette fille ? Nick, chante pour moi. Je t'en supplie. A vos marques. Prêts. Partez. »
Une chouette nuit toute en musique, coup de foudre et building new-yorkais.




lundi 2 novembre 2015

[Livre] Les profondeurs de la Terre de Robert Silverberg

Lgf - Le livre de poche, 2012
285 pages
Date de parution originale : 1970
Titre VO : Downward to the Earth

Ancien administrateur colonial de Belzagor, Gundersen revient sur cette planète après qu'elle ait obtenu son indépendance. Il voudrait renouer avec son passé et trouver la paix en expiant ses fautes et toutes celles commises sur ce monde par les terriens. C'est pourquoi il s'enfonce dans la jungle épaisse et profonde, à la recherche d'un mystérieux Pays de la Transformation. Il espère y découvrir aussi le secret de l'entente des deux espèces intelligentes de Belzagor, les Nildoror herbivores qui ressemblent un peu à des éléphants et les Sulidoror carnivores, bipèdes humanoïdes. Car tout se tient dans la vie sur ce monde. Et bien plus qu'il ne le croit.

15/20

Lu sur un coup de tête et pour un challenge, la quatrième de couverture m'avait donné quelques réticences : le roman est court et l'univers semblait dense à assimiler en si peu de pages. Pourtant, dès les premières lignes, j'ai vite compris que, décidément, chaque roman de Robert Silverberg est une surprise.
« Il était finalement sur la Terre de Holman. Il ne savait d'ailleurs pas trop pourquoi. Peut-être à cause d'une attirance irrésistible ; peut-être par sentimentalité ; ou peut-être même sur un coup de tête. Gundersen n'avait jamais envisagé de revenir sur cette planète. Et pourtant, il était là, debout devant l'écran panoramique, attendant l'atterrissage, contemplant la sphère qui était assez proche pour qu'il pût la prendre et l'écraser dans sa main. Un monde légèrement plus gros que la Terre, un monde qui lui avait pris les dix plus belles années de sa vie, un monde où il appris sur lui-même des choses qu'il aurait préféré ne pas connaître. »
Greffant un discours post-colonialiste sur une histoire de science-fiction, Silverberg nous propose un voyage sur la planète Belzagor, ancienne colonie terrestre désormais abandonnée. Gundersen, ancien administrateur dans cette colonie, retourne sur la planète des années après que les humains l'aient quitté... et des années après que les peuples autochtones aient repris leurs droits sur leur monde.
« Il existe sur chaque monde certaines cases qui doivent être remplies. La Création suit partout les mêmes chemins. »
Il y a un véritable cheminement de pensée vis-à-vis du colonialisme et de la nature des hommes. Durant toute l'histoire, qui finit, pour Gundersen, par prendre des allures de quête initiatique et identitaire, le personnage est amené à s'interroger sur la nature humaine et sur la prétendue domination des hommes. Au contact des deux races autochtones pré-dominantes, les Nildoror et les Sulidoror, ses idées évoluent et la prise de conscience est flagrante. J'ai beaucoup aimé suivre l'évolution de la pensée de Gundersen selon ses rencontres, des rares humains vivant encore sur Belzagor, aux Nildoror qui l'accompagnent durant une partie de son voyage.
« À quoi cela nous mène-t-il ? Pourquoi ne pouvons-nous nous entraider ? Nous sommes deux êtres humains perdus sur un monde bien plus étrange et bien plus mystérieux que la plupart des gens le croient ; si nous ne pouvons nous donner mutuellement de l’aide et du réconfort, à quoi servent les liens de l’humanité ? »
Tout au long du roman, on retrouve vraiment le style de l'auteur, ce genre de SF pleine de détails, qui tourne autour d'un univers très complet... mais qui reste très simple à comprendre et à savourer. Les descriptions de Belzagor, de sa faune et de sa flore, sont magnifiques et très détaillées, on imagine sans mal toutes les singularités de ce monde un brin mystique dans lequel Gundersen entame une quête qui le changera à jamais.

Un périple riche en enseignements dans un univers fascinant. Robert Silverberg fait désormais partie de ces auteurs dont j'attaquerai un roman sans la moindre appréhension.




mercredi 28 octobre 2015

[Livre] H2G2, tome 2 : Le Dernier Restaurant avant la Fin du Monde de Douglas Adams

Gallimard - Folio SF, 2000
224 pages
Date de parution originale : 1 juin 1980
Titre VO : The restaurant at the end of the universe

Pas de panique ! Votre Guide galactique en poche, vous voilà prêt à affronter les pires épreuves que recèlent les gouffres de l'espace : le Vortex à Perspective Totale, les concerts d'Oscar Paulette (fameux chanteur de plutôt-rock cataclysmique), les Allègres Transports Verticaux de la Cybernétique de Sirius, et... le plat du jour du Dernier restaurant avant la fin du monde. Bon appétit et bonne route !

14/20

Un an après avoir lu le premier tome d'H2G2, je me décide enfin à attaquer la suite. Il m'en aura fallu du temps pour aller le visiter, ce fameux restaurant de la fin du monde. Il faut dire qu'après un premier tome haut en couleurs et bourré d'humour, j'avais un peu peur d'être déçue par une suite qui ne serait pas aussi bonne. 
Et ce fut malheureusement le cas.
« D’après une théorie, le jour où quelqu’un découvrira exactement à quoi sert l’Univers et pourquoi il est là, ledit Univers disparaîtra sur-le-champ pour se voir remplacé par quelque chose de considérablement plus inexplicable et bizarre.Selon une autre théorie, la chose se serait en fait déjà produite. »
On retrouve dans ce deuxième roman l'humour et l'absurde qui marchent si bien dans cette saga et qui lui donnent toute son originalité. J'ai beaucoup aimé retrouvé les personnages, leurs manies, leur nonchalance, leur cynisme et l'univers de SF si original et farfelu dans lequel ils évoluent.
« L’Univers (comme on a déjà pu l’observer) est un endroit aux dimensions considérablement inquiétantes par leur gigantisme (un fait que, pour leur petit confort personnel, la plupart des gens ont tendance à vouloir ignorer). »
Mais (puisqu'il y a bien sûr un "mais"), c'est l'histoire qui pêche en ce qui me concerne. Trop abracadabrante, elle m'a souvent perdue. C'était bien parti pourtant, le premier chapitre est un concentré de tout ce que j'avais aimé dans le premier tome. Mais bien vite, mon intérêt s'est un peu éteint. J'ai bien aimé l'idée de ce restaurant perdu dans sa boucle temporelle, ou les idées sur la théorie de l'évolution. Pour le reste, j'aurais aimé quelque chose de plus linéaire, qui se perde moins dans des histoires parallèles.
« L’Histoire de toute civilisation galactique de quelque importance tend à traverser trois stades distinctement reconnaissables : celui de la Survie, celui de la Recherche, enfin celui de la Sophistication, également connus sous le nom de stades du Comment, du Pourquoi et du Où ? Par exemple, le premier stade est caractérisé par la question : Comment manger ? le second, par la question : Pourquoi manger ? et le troisième par la question : Où va-t-on bien déjeuner ? »
Bon, heureusement tout n'est pas à jeter (bien au contraire) et il faut reconnaître à Douglas Adams sont esprit délicieusement loufoque. Ça a au moins le mérite de faire passer un bon moment de lecture, tout en humour et légèreté. À voir ce que donnera le troisième tome.



vendredi 23 octobre 2015

[Film] Un + Une de Claude Lelouch

Français - 1h53
Sortie en France le 9 décembre 2015
Avec : Jean Dujardin, Elsa Zylberstein, Christophe Lambert

Antoine ressemble aux héros des films dont il compose la musique. Il a du charme, du succès, et traverse la vie avec autant d’humour que de légèreté. Lorsqu’il part en Inde travailler sur une version très originale de Roméo et Juliette, il rencontre Anna, une femme qui ne lui ressemble en rien, mais qui l’attire plus que tout. Ensemble, ils vont vivre une incroyable aventure…

15/20


J'ai vu le film en avant-première lors du Festival du Film Francophone d'Angoulême en août dernier, Un + Une était alors mon premier film de Claude Lelouch, dont je n'avais encore jamais vu de longs-métrages (et c'est toujours le cas d'ailleurs, il faudrait vraiment que je m'y mette). Outre le plaisir de voir une partie de l'équipe du film faire une apparition à la projection pour présenter le film, j'étais plutôt contente d'enfin pouvoir découvrir le réalisateur. Surtout qu'Un + Une m'a plu et m'a donné envie de jeter un œil plus attentif à la filmographie de celui-ci !

Le film raconte une romance passagère mais presque fulgurante sur fond de paysages indiens. Il livre l'histoire de la relation entre un homme et une femme dans toute la complexité que ça implique, mais tout en restant très épuré. J'ai beaucoup apprécié ce fil conducteur qui garde en permanence une simplicité déconcertante. On parle d'amour, on parle d'adultère, de tromperie mais rien ne semble jamais être compliqué car c'est spontané, la romance ne s’encombre pas réellement des usages et baigne dans la franchise la plus totale. Le film prend ainsi plaisir à briser les lieux communs et clichés. 

J'ai été très surprise par la liberté donnée aux acteurs dans leur interprétation qui devient alors très naturelle. Ces moments d'improvisations donnent l'impression que l'on pourrait croiser les personnages dans la rue et assister à leurs échanges de la même façon dont on les observe de derrière nos écrans. Cette aisance des acteurs à se renvoyer la balle m'a d'ailleurs énormément plu. Jean Dujardin est excellent dans ce type d'exercice et Elsa Zylberstein est une partenaire tout à fait à la hauteur. La connivence entre les deux acteurs était palpable et n'en rendait l'histoire que plus plaisante.




Et puis, surtout, le film fait voyager. On passe du ton taquin et comique des échanges entre les deux protagonistes aux magnifiques images d'une Inde présentée dans toute sa spiritualité. Des bords du Gange et de toutes les croyances qui y sont associées à Amma la gourou indienne et son humilité inconditionnelle, on se retrouve face à une spiritualité très douce, très éthérée, qui apporte un petit côté magique et hors du temps au film. Un peu à l'image de la romance entre les deux personnages finalement : quelque chose de très spontané qui s'ouvre et se referme, comme une parenthèse.

En tout cas, si les personnes ayant vu le film avec moi ont été plutôt déçues (connaissant le réalisateur, j'ai eu le droit au fameux "c'était mieux avant"), moi qui ne connaissait pas tout Claude Lelouch, j'ai pris le film sans pouvoir le comparer à d'autres et, de l'histoire à la réalisation en passant par les acteurs, j'ai été totalement conquise.