samedi 9 mai 2015

[Livre] La Fille du train de Paula Hawkins

Sonatine, 2015 - 378 pages
Date de parution originale : 2015
Titre Vo : The Girl on the Train

Vous ne voyagerez plus jamais comme avant... Depuis la banlieue où elle habite, Rachel prend le train deux fois par jour pour aller et revenir de Londres. Chaque jour elle est assise à la même place et chaque jour elle observe une jolie maison. Cette maison, elle la connaît par cœur, elle a même donné un nom à ses occupants qu'elle aperçoit derrière la vitre : Jason et Jess. Un couple qu'elle imagine parfait, heureux, comme Rachel a pu l'être par le passé avec son mari, avant qu'il ne la trompe, avant qu'il ne la quitte. Mais un matin, elle découvre un autre homme que Jason à la fenêtre. Que se passe-t-il ? Jess tromperait-elle son mari ? Quelques jours plus tard, c'est avec stupeur qu'elle découvre la photo de Jess à la une des journaux. La jeune femme, de son vrai nom Megan Hipwell, a mystérieusement disparu...

17/20


C'est dans le hall d'une gare que je suis tombée avec amusement sur une des affiches annonçant la sortie de La Fille du train de Paula Hawkins. J'avais repéré le roman quelques mois auparavant mais il m'était complètement sortie de la tête. Le livre sortant le jour-même, il ne me restait plus qu'à me le procurer, à prendre place dans mon train et à embarquer au cœur de cet excellent thriller.
« Nous sommes tous des voyeurs. Les gens qui prennent le train tous les jours pour se rendre au travail sont les mêmes partout dans le monde : chaque matin et chaque soir, nous sommes installés sur notre siège, à lire le journal ou écouter de la musique ; nous observons d’un œil absent les mêmes rues, les mêmes maisons et, de temps à autre, nous apercevons un éclair de la vie d’un inconnu. Alors on se tord le cou pour mieux voir. »
Rachel est une jeune femme solitaire. Son couple, fragilisé après que leurs tentatives de faire un enfant aient échoué, n'a pas supporté l'alcoolisme dans lequel elle avait fini par tomber. Aujourd'hui seule, sans emploi, hantée par le souvenir de Tom, son ex-mari qui a depuis refait sa vie, Rachel puise sa force dans les bouteilles d'alcool et les histoires qu'elles inventent sur le couple qu'elle aperçoit à travers la vitre du train qu'elle prend chaque matin et soir. Elle les appelle Jess et Jason et, tous les jours, elle tisse dans son imagination des pages de leur vie. Mais un matin, le visage de Jess s'affiche partout dans les médias. La jeune femme s'appelle en réalité Megan et elle vient juste de disparaître...
« Peu à peu, j’ai compris que, quand on se réveille dans cet état-là, on ne demande pas ce qui s’est passé, on se contente de dire qu’on est désolé : on est désolé de ce qu’on a fait et de ce qu’on est, et on ne se comportera plus jamais ainsi, jamais. »
Il y a des livres, comme ça, qui nous assurent au bout de seulement quelques pages que l'on va passer un excellent moment. La Fille du train est de ceux-là. Histoire à trois voix, on se retrouve embarqué dans les vies de Rachel la fille du train, Megan la victime et Anna la nouvelle épouse de Tom. Trois personnes qui n'auraient s'en doute jamais pensé avoir affaire l'une à l'autre et qui se retrouvent rassemblées autour d'un même quartier, théâtre de leurs trois histoires. Trois voix de femmes, trois narratrices dont les récits s'alternent et dont on apprend peu à peu les vies respectives, dont on découvre les personnalités... et les secrets également. Les récits sont aussi découpés selon les soirs et les matins, au rythme du trajet de train quotidien de Rachel, un petit détail qui m'a beaucoup plu et structure le roman d'une façon plutôt originale.
« Il y a quelque chose de réconfortant à observer des inconnus à l’abri, chez eux. »
Qui n'a jamais, en prenant le train ou même le bus, tenté d'imaginer les vies des gens qui nous entourent, des autres passagers ou de ceux que l'on voit derrière la vitre ? Ce sont de parfaits inconnus et pourtant, on capte inconsciemment ces petits détails qui nous donnent des indices sur leur vie, sur ce qu'ils sont. La musique que l'on entend à travers des écouteurs, une façon de s'habiller, deux personnes qui se tiennent discrètement la main, un livre en train d'être lu. Il est réellement facile d'imaginer des mondes et les vies qui vont avec. Et, malgré les faiblesses que portent Rachel, il est simple, dans ces moments là, de comprendre sa démarche et ce qu'il lui passe par la tête.
« "On a beaucoup de mal à lui faire faire ses nuits." On. Nous. Notre petite famille. Avec nos problèmes et notre routine. Quelle connasse. Si c’était un oiseau, ce serait un coucou. Elle est venue pondre ses œufs dans mon nid. Elle m’a tout pris. Elle a tout pris, et maintenant elle m’appelle pour me dire que ma détresse la dérange ? »
C'est d'ailleurs peut-être pour cette raison qu'il est si simple de prendre la jeune femme en sympathie. Bien qu'on se retrouve un peu désarçonné face à cette protagoniste instable à laquelle on ignore si on peut se fier à cause de son alcoolisme, des nombreux trous noirs qui l'accompagne et de sa fragilité psychologique, Rachel touche par son parcours chaotique et les épreuves qu'elle a du traverser. Au fond du gouffre, on comprend les raisons qui l'ont amené à de telles extrémités. Inévitablement, la pitié vient se rajouter à l'empathie qu'elle dégage. En comparaison, j'ai eu beaucoup plus de mal à accrocher à Anna et Megan, la première dégageant une certaine sûreté d'elle-même et de sa vie bien rangée qui la rend antipathique, la deuxième étant beaucoup trop rongée par les secrets.
« La tristesse se change en quelque chose de pire : un souvenir, une vision d’hier. »
Tout au long du roman, les hypothèses vont bon train, tout le monde revêt à un moment ou l'autre la casquette du coupable et entre mensonges et trahisons, il parfois compliqué d'y voir clair et de trancher sur qui sont les gentils et qui sont les méchants. Du coup, lorsque l'intrigue finit par se résoudre, on est assez loin d'avoir compris le fin mot de l'histoire avant qu'il ne nous soit annoncé. Et j'avoue que pour une fois, le dénouement me satisfait pleinement !
« Le vide : voilà bien une chose que je comprends. Je commence à croire qu’il n’y a rien à faire pour le réparer. C’est ce que m’ont appris mes séances de psy : les manques dans ma vie seront éternels. Il faut grandir autour d’eux, comme les racines d’un arbre autour d’un bloc de béton ; on se façonne malgré les creux. »
La Fille du train est un très bon thriller contemporain qui, abordant l'infidélité et l'alcoolisme, traite de sujets actuels. Avec son intrigue bien ficelée et parfois très forte psychologiquement, le lecteur se retrouve piégé dans ces histoires entremêlées qui cachent bien des choses à découvrir.  Un premier roman qui ne manque certainement pas d'intérêt, comme l'obtention des droits adaptation sur grand écran par Spielberg tend à le confirmer.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire